Conversations avec Geneviève – Episode 1 – Malika BenMesbah

Une conversation entre bibliothécaires, voici ce que je propose dans cette vidéo, avec comme première invitée Malika BenMesbah. Nous exerçons le même métier, mais chacune à notre manière. La richesse de cette institution, c’est précisément sa souplesse qui lui permet de s’adapter à toutes sortes de contextes, et cela, en fonction de la sensibilité et de la créativité des responsables. Chaque bibliothèque a sa personnalité. Toutes ont le même objectif : pour le plus grand nombre, c’est susciter le désir de lire.

Malika Benmesbah dirige la médiathèque de l’hôpital Robert-Debré. Elle fait là un vrai travail de pionnière en animant une médiathèque publique accueillant, dans un même espace, enfants, jeunes, familles et personnel soignant. J’ai suivi avec intérêt son parcours professionnel. Parfois, nous l’avons vécu ensemble. En Arménie, notamment, où, au cours de plusieurs missions, elle a joué un rôle déterminant auprès des enfants et des jeunes. Je l’ai vue à l’œuvre aussi lorsqu’elle travaillait à la bibliothèque jeunesse de Gennevilliers et organisait pour les jeunes, entre autres, des initiations à la pensée avec l’aide d’une philosophe. L’expérience de Malika est donc particulièrement variée et ne peut qu’enrichir nos échanges.

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Les dimanches à la bibliothèque de Clamart

Je retourne régulièrement à la bibliothèque des enfants de Clamart pour y retrouver les enfants et l’équipe qui anime cette petite bibliothèque ronde (PBR). Notre bibliothèque, depuis 2007, est ouverte le dimanche pour accueillir enfants et parents.

J’ai été heureuse de pouvoir venir à la bibliothèque, ces trois derniers dimanches. À  l’occasion de l’année Japonisme 2018, des albums d’origine japonaise étaient présentés aux enfants. Une place particulière était donnée à l’œuvre de l’artiste japonais Seiichi Horiuchi que nous avions reçu autrefois en ami. Il avait d’ailleurs réalisé pour les enfants de la bibliothèque un kamishibai et ce, à une époque où cet art de raconter n’avait pas franchi les frontières du Japon. Aujourd’hui, un des plus grands éditeurs français a décidé de publier un de ses albums. Bonne collaboration entre l’éditeur et la bibliothèque prenant en compte l’accueil des enfants.

Quelle joie de reprendre ainsi contact avec cette chère bibliothèque ! J’ai été vivement impressionnée par la qualité de l’atelier proposé et par le calme qui régnait dans l’atelier. Les enfants s’en sont donnés à cœur joie pour construire avec l’aide d’une artiste japonaise et les « bibliothécaires du dimanche » la scène du pique-nique qui termine le bel album japonais Burumba, le jardin d’enfants des éléphants. On venait de tous les quartiers de Clamart,- quartiers aisés et quartiers populaires- pour participer à cette fête où chacun trouvait sa place en compagnie des autres.

J’ai aussi bien aimé, ces dimanches, la place donnée aux lectures partagées dans l’intimité, la confiance, j’ai aimé la place donnée à la parole spontanée des enfants et à celle des parents. Plaisir de tourner les pages, les toucher, fouiller l’image à la recherche de détails qu’ils sont si fiers de repérer. La lecture partagée ainsi, c’est un vrai cadeau pour l’adulte comme pour l’enfant. Pratiquée par le maître en classe, pour un groupe constitué, c’est bien différent. L’enfant se contente d’écouter sans vraiment prendre part.

À la bibliothèque du dimanche, il y a presque toujours la présentation de kamishibais.  Lire à voix haute une œuvre littéraire ou un beau texte documentaire à un groupe, a ici tout-à-fait sa place. Il suffit que nous soyons sensibles à un texte et que nous ayons le désir de le faire goûter aux enfants ; alors, on trouve le ton juste et le rythme qui convient. Il en va donc du choix de l’œuvre.

Pour aller plus loin, pour trouver de beaux textes à lire aux enfants, je conseille de lire dans mon livre Laissez-les lire. Mission lecture les pages 199 à 212 sur la parole vive à la bibliothèque. Je souhaite, en retour, recevoir vos réactions et compte-rendu d’expériences, éventuellement vécues le dimanche.

Retour aux sources

Je voudrais évoquer brièvement les sources où se sont abreuvées les meilleures bibliothèques. C’est à l’Heure Joyeuse de la rue Boutebrie que tout a commencé. La bibliothèque des enfants de Clamart appelée autrefois la bibliothèque de La Joie par les livres, s’appelle aujourd’hui, La Petite Bibliothèque Ronde. Elle s’en est largement inspirée. Les premières bibliothécaires, Marguerite Gruny et Mathilde Leriche parties à la retraite en 1968 n’ont jamais cessé de m’inspirer. Lire la suite « Retour aux sources »

La bibliothèque, terre nourricière

Nul doute, on vient à la bibliothèque pour se nourrir de 1000 façons. On se nourrit de récits, de contes, d’œuvres belles et savoureuses. On goûte aussi à toutes sortes de cuisines. On les prépare, on en hume les odeurs, on s’en régale.

À Clamart, tous les mercredis, dans les premières décennies, comme les journées étaient chargées, – les enfants étaient fort nombreux – ; comme nous avions souvent la visite d’étrangers venus de loin pour faire connaissance avec cette bibliothèque connue dans le monde entier, nous avions table ouverte. Juliette, la femme de service, préférant l’art culinaire à celui du ménage, aimait nous mijoter quelques mets de son Auvergne natale et cela sentait fort bon. Michel, un ancien lecteur, me disait combien il aimait ces odeurs de bonne cuisine, lorsqu’il arrivait le mercredi matin. Pour lui, la bibliothèque avait ainsi tous les charmes d’une maison vivante et accueillante.

À la veille de l’ouverture de la bibliothèque des enfants de Clamart, en octobre 1965, j’avais été chargée de la présenter aux nombreux journalistes venus découvrir ce lieu inhabituel. J’insistais sur la diversité des modes de connaissance, des formes de cultures et de l’ouverture au monde. Je mentionnais les ateliers proposés aux enfants et je citais l’atelier cuisine. Celui-ci me paraissait digne d’intérêt. La bibliothèque ne se limite pas au prêt de livres. C’est un lieu du faire, du faire ensemble, du faire pour les autres et pour la communauté. C’est le lieu de tous les arts. Lire la suite « La bibliothèque, terre nourricière »

La bibliothèque des enfants. Pour tout de suite et pour demain !

Demain , je commencerai. C’était bien ce que je répondais à mes amis lorsqu’ils me pressaient d’ouvrir un blog. Oui, demain, parce que je n’ai pas le temps pour cela, leur ai-je répondu, au fil des années. Or, me voilà maintenant impatiente de m’y mettre. Pourquoi ?

Demain, c’est le titre du magnifique documentaire de Mélanie Laurent et Cyril Dion que je viens de découvrir avec jubilation. En voyant la diversité des initiatives présentées, je ne cessais de me dire, tout au long du film, que la bibliothèque des enfants à Clamart, celle qui fut créée, il y a plus de 50 ans, avait bien sa place à leurs côtés.

Même réaction à la lecture d’articles divers parus en novembre dernier dans Télérama (n°3490) Un n° spécial intitulé : Vite ! Une nouvelle société. Personne n’est insensible à ces messages concrets, fortement documentés et réfléchis. Tous nous voulons vivre dans un monde plus humain avec le désir de contribuer à la naissance d’un monde autre. Alors retroussons nos manches ! Demain, une nouvelle société ; la bibliothèque des enfants de Clamart, la petite bibliothèque ronde, aujourd’hui menacée de disparaître devrait continuer à avoir là une place de choix.

Intime, informelle et ouverte aux grands vents venus d’ailleurs, la bibliothèque des enfants est bien le symbole de la société conviviale et collaborative qui est en train d’apparaître. La petite bibliothèque ronde à Clamart devrait continuer à rouler comme la galette de Roule Galette, cet album tant aimé des enfants.

Personnellement invitée à faire connaître la maison bibliothèque, je ne cesse de parcourir le monde pour faire connaître son caractère profondément humain.

Dans deux ouvrages récents, publiés en 2012 (Gallimard Jeunesse) et 2015 (Les Arènes et l’École des loisirs), je raconte ce qui nourrit ma vie professionnelle, depuis plus de 50 ans et aujourd’hui encore.

À bientôt !

livre_g-patte_couv154x240Mais qu’est-ce qui les fait lire comme ça ?
Éditions Les Arènes – L’école des loisirs

« Des millions d’enfants ont découvert le bonheur de lire grâce à l’expérience fondatrice de « la Petite bibliothèque ronde » à Clamart,  au rayonnement de l’association La Joie par les livres et de “ la Revue des livres pour enfants que Geneviève Patte a initiées et portées pendant des années fécondes.

Dans ce livre foisonnant d’expériences partagées et de choses vues aux quatre coins du monde, tissé d’éblouissements de lecture et d’histoires humaines fortes, Geneviève Patte montre que des lieux de lecture et de rencontres peuvent naître partout, dans les milieux les plus divers, notamment auprès de populations éloignées du monde de l’écrit.

La bibliothèque est un lieu où chacun est reconnu et peut faire entendre sa voixLe regard du petit réveille notre enfance oubliée. Et quel plaisir pour lui d’avoir, à ses côtés, un adulte capable de s’intéresser à son monde d’enfant ! « Mais qu’est-ce qui les fait lire comme ça ? » est un récit d’enthousiasme et une ode à l’imagination, à l’audace et au respect de l’enfant. »

laissez-les-lire-couvLaissez-les lire ! Mission lecture
Éditions Gallimard Jeunesse

Comment éveiller le goût de lire chez l’enfant ? Comment l’aider à suivre son parcours de lecteur, du premier album à la littérature sous toutes ses formes?

Nul n’est mieux qualifié que Geneviève Patte pour répondre à ces questions. Fondatrice de La Joie par les livres, et de la bibliothèque de Clamart, elle ne cesse de parcourir le monde pour transmettre son expérience et défendre une certaine idée des bibliothèques pour enfants : des lieux de vie et de partage où l’adulte accompagne les plus jeunes dans leurs découvertes.

Dans la réédition revue et augmentée de ce classique, elle revient sur son itinéraire et propose des clefs pour aujourd’hui. Ce témoignage d’une bibliothécaire d’exception passionnera par sa clarté et sa profondeur tous ceux qui, parents, enseignants ou médiateurs sociaux, sont engagés dans l’exigeante mission lecture. »